Des mécanismes de protection sociale ont été mis en place dans de nombreux pays industrialisés au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Leur organisation connaît de grandes différences selon les pays. Ils n’ont cessé de s’étendre depuis leur apparition .
Deux principes peuvent présider à l ‘organisme d’un système de protection sociale, l’assurance et l’assistance. La logique de 1’assistance consiste à verser un minimum de ressources à toute personne qui en a besoin, indépendamment de ses versements antérieurs. La logique de l ‘assurance lie l ‘ouverture des droits sociaux aux cotisations versées. En France, les deux logiques coexistent. Les organismes de protection sociale (URSSAF, UNEDIC) suivent la logique de l’assurance tandis que l’État prend en charge certaines formes d’assistance (RSA, minimum-vieillesse).
La protection sociale est une réponse collective au besoin de couverture contre les risques sociaux. Elle se distingue des assurances individuelles dans lesquels les individus doivent choisir d’affecter une partie de leur épargne à cette protection. La contrepartie de ce principe de solidarité est le caractère obligatoire des versements.
La protection sociale et son évolution
La protection sociale n’a cessé de s’étendre. Les risques couverts sont devenus de plus en plus nombreux, et le financement a pris de plus en plus d’ampleur. Cotisations et prestations dépassent aujourd’hui 30 % du revenu disponible des ménages.
La complexité de l’organisation de la protection sociale en France résulte d’une accumulation d’institutions nées à des époques différentes. Organisés sous la forme du paritarisme, c’est-à-dire d’une gestion conjointe par les syndicats et les organisations patronales, différents régimes permettent la protection des personnes. La Sécurité sociale en regroupe plusieurs : régime général (salariés du commerce et de l’industrie), régime agricole (salariés et exploitant), régimes spéciaux et régimes particuliers (fonctionnaires, militaires, étudiants), régimes autonomes (non salariés). Le régime général de la Sécurité sociale est organisé en caisses (caisses nationales d’assurance vieillesse, d’assurance maladie, d’assurance familiale). Enfin, le régime d’indemnisation du chômage est géré par l’Union nationale pour l’emploi dans l’industrie et le commerce (UNEDIC).
Le financement de la protection sociale reste essentiellement lié aux revenus du travail, et plus particulièrement aux salaires:
Le mouvement de déplafonnement des cotisations a contribué à diminuer le poids relatif des bas salaires dans les recettes de la protection sociale mais il a rééquilibré le financement au profit des employeurs, de même que les mesures d’exonération de charges sociales en faveur de l’emploi.
L’État est amené à intervenir de plus en plus dans le financement des régimes de protection sociale. Depuis le début des années quatre-vingt-dix, de nouvelles taxes ont été instaurées (contribution sociale généralisée, remboursement de la dette sociale), les cotisations d’allocations familiales ont été fiscalisées. Cette évolution tend à accroître le poids du financement public.
Les risques sociaux et leur couverture
Le risque vieillesse est couvert par deux types de prestations : les préretraites et les retraites relevant de la logique d’assurance, le minimum vieillesse relevant de l’assise f tance. Les retraites sont financées par répartition entre les actifs et les retraités selon un calcul faisant intervenir la durée de cotisation (43 ans pour la retraite à taux plein pour les personnes nées après 1973) et le montant des salaires (moyenne des vingt meilleures années). Mais ce système est remis en cause sous l’effet de plusieurs facteurs:
- l’augmentation de1’espérance de vie,
- le ralentissement des cotisations dû au chômage, à la faible progression de la masse salariale,
- l’arrivée à l’âge de la retraite de générations nombreuses aux carrières complètes.
Le minimum vieillesse est financé par le budget de l’État.
Les prestations familiales visent deux objectifs : favoriser la natalité et assurer une redistribution entre les familles nombreuses et les autres. Ce sont des prestations en espèces prenant la forme d’allocations familiales, d’allocation rentrée scolaire, d’aides au logement.
Les prestations chômage relèvent de l’assurance (allocation unique dégressive en fonction de la durée de cotisation) et de l’assistance (personnes n’ayant jamais travaillé et chômeurs en fin de droits).
Les prestations santé couvrent les risques de maladie, d’accident du travail et d’invalidité. Elles comprennent des remboursements de frais, des prestations en espèces (indemnités journalières) et des rentes d’incapacité.
D’autres risques sont couverts par la protection sociale : catastrophes naturelles,
violences criminelles, exclusion, guerres. . . Le versement du RSA est pris en compte
dans ces autres risques.
Pour compléter les indemnisations, il est possible d’adhérer à des mutuelles (retraite complémentaire, complémentaire maladie) qui fonctionnent sur le même principe que la protection sociale mais n’ont pas son caractère obligatoire.
Les difficultés financières de la protection sociale
La hausse des dépenses de protection sociale est due à des causes économiques,
sociologiques et démographiques :
- généralisation et amélioration de la couverture des risques
- croissance du coût des prestations (dépenses de santé),
- vieillissement de la population
- augmentation du nombre de chômeurs.
Le ralentissement des recettes est lié à la faible progression des salaires, à la chute de l’effectif cotisant du fait de l’augmentation du chômage.
Les déficits sociaux se traduisent chaque année par un ajustement a posteriori des recettes aux dépenses (emprunts, contribution du budget de l’État). Des mesures ont été prises pour tenter de résorber ces déficits : hausse des taux de cotisation, dé plafonnement, fiscalisation de certaines cotisations, instauration de nouvelles taxes (CSG, CRDS) pesant sur tous les revenus, allongement de la durée de cotisation pour la retraite, limitation de l’offre médicale par la responsabilisation des assurés et des professionnels de la santé (maîtrise des dépenses de santé).
Le défi de l’exclusion
Le phénomène de l’exclusion remet en cause l’efficacité de la protection sociale et présente un risque pour la cohésion sociale. L’exclusion est directement issue de la persistance de la crise, de l’allongement de la durée du chômage. On peut le caractériser par la rupture des liens sociaux.
L’exclusion du monde du travail conduit à l’exclusion sociale: la privation d’emploi a, au-delà des conséquences économiques, des conséquences sociales importantes, surtout dans un contexte de réduction des prestations sociales, de socialisation par l’emploi.
L’exclusion fait apparaître une société duale : ce dualisme se manifeste par une rupture entre les individus insérés professionnellement et socialement et les autres : chômeurs de longue durée, sans domicile fixe. Plus longue est l’exclusion, plus dure est la réinsertion. L’« employabilité » diminue avec le temps. Ne bénéficiant que d’une protection sociale limitée, les exclus doivent compter sur les associations caritatives.
La protection sociale tente de s’adapter au défit de l’exclusion. La mise en place du revenu minimum d’insertion depuis 1988 tente de pallier les insuffisances de la protection sociale traditionnelle, conçue dans une époque de plein emploi. En outre, le RMI ouvre droit à une allocation logement et à une couverture sociale.
En 2009, le RSA (Revenu de Solidarité Active) est venu remplacer le RMI et l’API (Allocation Parent Isolé). Ce nouveau dispositif de lutte contre l’exclusion reprend les principes de l’impôt négatif développé par Friedman en 1962. Il s’agit de provoquer une hausse significative du revenu lorsque l’individu au chômage retrouve un emploi. Jusque-là, la perte des indemnités lors de la sortie du chômage réduisait fortement l’attractivité de la perception d’un salaire. Le dispositif du RSA doit permettre, par une réduction progressive des indemnités perçues, de rendre l’emploi salarié synonyme d’une élévation du revenu plus significative et donc plus stimulante pour les personnes en situation de chômage.
Application : En quoi la montée du chômage a-t-elle remis en cause le système de financement de la protection sociale ?
Corrigé :
Le système de protection sociale actuel a été conçu en période de plein emploi. Principalement assis sur les salaires, son financement a permis une amélioration générale du niveau de protection pendant les années de croissance. En période de crise de l’emploi, il montre ses limites.
• Le chômage contribue à l’augmentation des dépenses sociales : malgré les diminutions successives de l’indemnisation, le risque chômage absorbe une part croissante des dépenses de protection sociale.
• Le chômage contribue à la stagnation des recettes : du fait du chômage, la masse salariale, sur laquelle repose une grande partie des recettes, stagne. Par ailleurs, son effet négatif sur la demande globale contribue à entretenir le ralentissement conjoncturel.
• Le chômage impose un autre mode de financement de la protection sociale, non plus assis sur les salaires mais sur les contributions de nature fiscale, à l’assiette plus large. Ce mouvement a déjà été lancé avec la mise en place de la CSG et du RDS. Il est certainement appelé à se généraliser.
Laisser un commentaire